L’écrivaine Mireille Calmel a eu la divine idée de consacrer son dernier roman à cette épouse aimante, résignée et étonnante de fidélité. Dans un récit épistolaire et érotique, elle retrace les premiers mois de ce couple uni par un mariage arrangé. Le roman nous plonge dans leur intimité qui sera bouleversée par une lettre anonyme informant la marquise des frasques de son mari. Une grande partie du livre se compose de cette correspondance entre cet inconnu et la jeune femme. Au fil des lettres on assiste à la transformation d’une femme chaste en une amante débridée. Comment celle qui se sentait davantage l’âme d’une martyre que d’une coquette va apprendre à se libérer des principes moralisateurs inculqués par sa mère ? « Une épouse ne jouit pas. Elle procrée. Dans l’obscurité, chemise remontée sur le haut des cuisses à peine entrouvertes et sur le dos. Faute de quoi elle devient une fille du diable. » Qui est ce mentor dévoué qui fera monter en elle le désir et l’initier à l’éveil des sens ? « Le simple fait de décider de céder à cette expérience me troubla tant les sens (…) le bouton de rose enflammé, je recommençai (…) j’ai appuyé jusqu’à me meurtrir les chairs. (…) Mon corps s’était tendu déjà, comme si, de lui avoir si longtemps interdit tout désir, il se vengeait en m’en révélant l’abîme.» S’aventurer dans ces chroniques libertines est un fabuleux plongeon dans les moeurs les plus secrètes de la cour de Louis XV au XVIII ème siècle. Rencontre avec Mireille Calmel.
Pourquoi avez vous choisi la Marquise de Sade ?
Par hasard. J’ai découvert les lettres du marquis à son épouse chez un ami. Ma curiosité a pris le dessus.
Qui est Renée Pélagie de Montreuil , comment la voyez vous ?
C’est une jeune femme de 22 ans très prude et très chaste. Très amoureuse aussi.
Comment cette jeune fille prude peut devenir la femme du plus grand libertin du 18 ème siècle ?
Par le jeu des alliances forcées. C’est sa mère qui a orchestré ce mariage. A ce moment là, personne n’avait conscience de la personnalité en devenir du marquis. Il n’avait pas encore fait parler de lui.
Qu’est ce qui pousse la marquise à s’ouvrir à une sexualité débridée ?
L’amour. Ce livre témoigne d’une étonnante histoire d’amour entre époux.
Comment décririez vous la relation de Sade et de sa marquise ?
C’est un jeu de séduction. Il fallait que le marquis brise les tabous de son épouse pour l’ouvrir à la sensualité.
Est ce que la marquise représente la dévotion absolue de la femme à l’homme, nous renvoie t-elle à la question de jusqu’où peut aller une femme par amour ?
Non je ne crois pas. Au contraire. Leur relation s’est construire ensuite sur une complicité. Elle n’aurait pas été possible si elle n’avait pas vu en lui le véritable Sade, celui qui a écrit des choses effroyables depuis ses cellules successives pour dénoncer les pratiques ignominieuses de ses pairs. Elle n’a jamais réagi comme une femme soumise.
Comment verriez vous la marquise de Sade en 2014 ?
Comme une femme qui découvre le plaisir et la sensualité et qui regarde devant elle sans tabou.
Après toutes ces correspondances érotiques, finalement est ce que l’imaginaire et le fantasme ne sont ils pas les clés du désir ?
Bien sur! Il faut les préserver au sein de chaque couple. Ne pas laisser le quotidien l’abîmer… Ce livre était destiné à ça!
Le livre : http://www.xoeditions.com/livres/la-marquise-de-sade/
L’exposition du Marquis de Sade au Musée d’Orsay se termine le 25 janvier !