Janine Mossuz-Lavau est Directrice de recherche émérite au CNRS et au CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po/CNRS) Elle est chargée de cours à Sciences Po Paris (cours sur « Genre et politique »).

Elle travaille depuis de nombreuses années sur les questions des femmes, de genre, les politiques de la sexualité. Elle a été membre de l’Observatoire de la parité de 1999 à 2005. Son dictionnaire des sexualités est sorti au mois de mars aux Éditions Robert Laffont (Collection Bouquins).

Qu’est ce qui vous a donné envie de travailler en grande partie sur la sexualité et plus particulièrement celle des femmes ?

J’ai travaillé sur l’ensemble des sexualités et je me suis intéressée aux combats et débats qui ont permis d’avoir des législations beaucoup plus favorables en matière de sexualité des femmes. J’ai étudié toutes les lois qui ont accompagné la contraception, l’avortement, le viol, la sexualité des jeunes et celles qui ont permis plus d’égalité pour les homosexuels. Je souhaitais comprendre les répercussions de ces changements sur les comportements. J’ai donc fait une enquête sur la sexualité en France en allant interroger des hommes et des femmes de tous les âges, tous les milieux et de toutes les religions, prêts à parler de leur vie amoureuse sexuelle.

Quelle est la particularité de votre dictionnaire ?

Le dictionnaire traite de la sexualité de A à Z aussi bien des hommes que des femmes. Il aborde toutes les sexualités depuis l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui dans différents pays d’Europe et du monde. Il prend en compte les hétérosexuels, les homosexuels, les transsexuels, les Queers, les bisexuels, les intersexués, de tous les points de vue : les religions, les civilisations, les droits, les pratiques mais aussi la littérature, la psychanalyse, le cinéma, la musique, la danse etc…

Quelle est la part de la sexualité dans la vie des femmes ?

Je dirais que la sexualité a pris beaucoup d’importance depuis ces trente dernières années grâce à ce que je considère comme la révolution du siècle c’est à dire les lois qui ont permis la dissociation entre la sexualité et la procréation. Auparavant les femmes vivaient leur sexualité avec la menace permanente d’une éventuelle grossesse et donc la peur d’un avortement clandestin ou d’un mariage rapide ou de se retrouver « fille-mère » comme on disait à l’époque. Les notions de plaisir et de désir étaient corsetées par ces peurs. Une fois que l’on a pu dissocier sexualité et procréation grâce à la pilule et à l’IVG, les femmes ont pu avoir des relations sexuelles sans crainte et se laisser aller à leur désir et plaisir. Ce qui a considérablement changé les choses, les femmes ont eu droit au plaisir et c’est même devenu une exigence de leur part.

Vous avez employé le terme de révolution, serait-ce tout simplement la révolution sexuelle des femmes ?

C’est un peu la révolution sexuelle pour tout le monde. Si les femmes n’ont plus peur de tomber enceinte et peuvent avoir des relations sexuelles plus fréquentes et plus intenses, les hommes en profitent aussi. Avant la pilule, les hommes devaient faire attention, se retirer ou ne pas avoir de rapports pendant les périodes dites fécondes.

Est ce que l’on tend vers une égalité sexuelle des hommes et des femmes ?

On y tend mais elle n’est pas encore réellement installée. Les grandes enquêtes nous montrent que la conception de la sexualité est différente pour les femmes qui l’associent presque toujours à un sentiment tandis que les hommes sont plus nombreux à dissocier les deux. C’est ainsi depuis la nuit des temps  même si cela évolue !

Est ce que la sexualité est une composante essentielle de l’épanouissement personnel des femmes ?

Je pense que c’est important car elle fait partie à la fois des modes d’expression et des plaisirs que procure la vie. Le sexe est une source de plaisir importante donc cela fait partie de l’épanouissement de tous.

Est ce que les femmes se masturbent plus qu’avant ?

Elles se masturbent un peu plus mais il y a toujours une grande différence avec les hommes qui le font pratiquement tous. Les sexologues recommandent la masturbation qui permet de mieux connaître son corps. Certaines femmes ne se sont jamais masturbées et d’autres le font mais ne veulent pas le dire comme si c’était encore de l’ordre de l’interdit.

Lors de vos enquêtes quels ont été les témoignages les plus originaux ?

Les témoignages les plus surprenants sont venus des hommes. Un garçon qui était très actif sexuellement m’a dit que lorsqu’il était adolescent à la campagne il avait un peu tout essayé, même les vaches, un autre m’a dit qu’il avait tenté le tuyau d’aspirateur sans succès et la petite chienne de sa mère. Sur ce genre de pratiques c’est difficile de donner un équivalent chez les femmes. Mis à part au début de mes études, lorsque le marché  des sex-toys n’était pas aussi florissant qu’aujourd’hui, certaines femmes utilisaient des légumes mais je n’ai jamais eu de témoignages touchant à la zoophilie, la nécrophilie et autres perversions de leur part.

La Renarde se plait à interviewer des femmes qui parlent de sexe.

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